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Le jour où une guerre civile fut évitée.

Ou comment des transistors évitèrent un drame

La séquence qui ouvre le film « Le fusil de bois » que je réalisai il y a des années, comporte le discours du Général de Gaulle, alors Président, le 23 avril 1961. Les radios transistors firent leur entrée dans l’histoire ce jour-là.

La guerre d’Algérie était alors dans sa 7ème année. 400.000 soldats, la plupart d’entre eux appelés du contingent, étaient en Algérie pour maîtriser l’insurrection. Grâce à une puissance militaire supérieure et à des centaines de kilomètres de barrage électrifié – 7.000 volts le long des frontières tunisiennes et marocaines, les français parvenaient à empêcher les insurgés – les Fellaghas – de pénétrer en Algérie. Bien qu’il n’y ait eu de victoire décisive, l’armée française dominait la situation.

Depuis 1959 cependant, de Gaulle était arrivé à la conclusion qu’il n’y avait pas d’avenir pour le colonialisme. Les critiques de la communauté internationale contribuèrent aussi à sa décision de préparer un plan selon lequel le peuple algérien choisirait son avenir. Lorsque ces intentions devinrent claires, elles furent dénoncées comme un acte de trahison par les colons français – les Pieds Noirs – et nombre d’officiers supérieurs dont beaucoup ressentaient encore la honte de la perte de l’Indochine.

Le haut commandement de l’armée considéra le probable retrait des troupes comme une insupportable humiliation et 4 généraux, Salan, Challe, Zeller et Jouhaud, décidèrent de renverser le gouvernement. Ils organisèrent un putsch et ordonnèrent aux troupes de se rallier à eux. De nombreux officiers de carrière et des unités de parachutistes et de la Légion Étrangère les entendirent, mais il était aussi nécessaire de convaincre les soldats du contingent dont l’enthousiasme était plus que mitigé. L’incertitude régnait et les rumeurs en tous genres circulaient. L’on disait que de Gaulle avait été renversé, qu’il avait fui, que les parachutistes allaient sauter sur Paris.

Le 23 avril, le Président s’adressa au pays dans un discours à la radio, affirmant qu’il était toujours aux commandes du pays, ridiculisant « un quarteron de généraux en retraite » et concluant par un « Français, françaises, aidez moi! » vibrant. Ce discours est gravé dans l’histoire de France.

Jamais avant ce jour avait-il été possible pour des soldats isolés dans le désert ou les montagnes d’entendre leur Président leur parler directement sans intervention possible de leur encadrement. Les appelés écoutèrent le Président de la République et décidèrent de lui obéir. Ce fut la fin du putsch. Les 4 généraux félons furent plus tard jugés et envoyés en prison. L’invention du transistor avait évité une guerre civile.